"L'homme est toujours curieux de voir ce qui est de l'autre côté du mur" me dit Abdou, le targui sédentaire, nomade dans l'âme.
Peut-être était-ce ce qui m'amenait là, au coeur du désert, dans cette ville surgie au milieu de nulle part où les touaregs se sont arrêtés, chassés par la sécheresse. "C'est la nature qui a sédentarisé les nomades, le gouvernement Algérien les a sauvés" ajoute-t-il
Dans l'air glacé du matin, à l'ombre des après midis torrides, les touaregs observent le ciel, les étoiles, le vent, le sable, cette absence peuplée. "Rien n'est plus peuplé qu'un désert" nous dit Bali, "Quand il pleut la vie qui attend réapparaît partout". Abdou encore: "Ca prendra un mois ou un an, là ça va faire vingt ans, mais quand la pluie reviendra nous retournerons au désert. La maison, c'est le tombeau d'un vivant".
En quête d'un ailleurs, d'un soi qui serait plus que soi même, de rencontres avec d'autres êtres, peut-être y a-t-il en chacun de nous un targui qui attend la pluie.
Avec ce vent du Sud qui pleut de l'ocre, mes pensées vont vers ceux qui nous ont accueillis, et ceux qui nous ont juste fugitivement souri. Qu'y a-t-il de plus précieux qu'un sourire?
Un jour la pluie est venue, on n'a retrouvé de Bali Hotmani, le poète joueur de oud, que son quatre quatre, il a été emporté par ce désert qu'il aimait tant.