Au quinze Août, ils étaient descendus à pied de leurs lointains villages de la cordillère des Andes, dans la altura, vêtus de leurs plus beaux habits, pour cette fête de la vierge, sainte patronne de Calca, prés de Cuzco. Le curé rose venu d’ailleurs spécialement pour l’occasion, taillé comme un première ligne de football américain et parlant allemand, leur promettait une fois de plus que demain, elle leur donnerait du travail, protègerait les récoltes, guérirait les infirmes.
A cette altitude, alors que l’homme de la plaine cherche en vain son oxygène, parmi ces danseurs fougueux de tous les âges -nombre d’entre eux étaient jeunes et beaux-, ces femmes aux vêtements traditionnels incroyablement colorés, vous n’aviez d’yeux que pour un petit bonhomme de sept ans peut-être. Il semblait ne plus même toucher terre, habité d’on ne sait quel ancien Dieu Inca. Il ne dansait pas : il était la danse. Danser jusqu’à l’épuisement est une offrande à la Pachamama, la déesse terre qu’on adore encore et toujours. Sous le vernis chrétien l’indien est resté animiste, le missionnaire feint d’ignorer ce compromis à la loi -jadis sanglante- du goupillon et de ses sabres.
Ils restent insoumis et fiers.