Dans ce pays on tue des enfants. Ils sont en surnombre, alors on élimine le surnombre. C’est un pays riche, avec des gens très riches, une production internationale, la coca, la blanche. L’activité locale la plus lucrative est l’enlèvement et l’assassinat. Tout le monde peut s’enrichir, c’est le rêve américain. Dans la ville, la « population urbaine » vit tant bien que mal. On se débrouille.
Il y a quarante ans, l’état a réprimé dans le sang une révolte paysanne, c’est là que la révolution a commencé. Aujourd’hui elle n’est ni faite ni à faire, les territoires sont établis, on ne se dispute plus que les zones frontières, en pratiquant de part et d’autre le meurtre et la terre brûlée. Les villages « indigènes » sont brûlés, leur population chassée ou massacrée. Il y a autour des trois grandes villes deux millions et demi de personnes déplacées vivant dans une misère absolue, deux millions d’enfants des rues.
Pour lutter contre les enlèvements perpétrés par les forces armées révolutionnaires l’état a favorisé la constitution d’une armée privée, les paramilitaires. Ils ont très vite compris que l’enlèvement et les narcotrafics sont plus lucratifs, ils ont établi leur propre territoire. Ils concurrencent les narcotrafiquants, seigneurs de la guerre. Quatre forces en présence, avec toutes les alliances et mésalliances temporaires imaginables pour lutter contre une menace commune. Les F.A.R.C., « Forces Armées Révolutionnaires de Colombie » deviennent narco ou s’allient avec eux contre les paramilitaires ou l’état, et ainsi de suite.
L’état de droite autoritaire à négocié le dépôt des armes avec les « para » contre l’impunité des crimes. Les « révolutionnaires » n’ont aucun choix : ils ont accepté un cessez le feu en 1985, ils ont participé à la création d’un parti de vaste union des gauches qui devait les représenter après le dépôt des armes. Prétextant des accrocs aux accords, réels supposés ou provoqués par l’extrême droite ou les services secrets Nord Américains, la trêve a été rompue, les FARC ont repris les chemins de la clandestinité, et tous les représentants élus du « Parti Populaire » ont été assassinés un par un. Tous ces « incidents isolés » amènent le Tribunal Pénal International à requalifier la notion de génocide, c’est la contribution du gouvernement Colombien au droit international. Ca peut durer encore quarante ans comme ça.